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Le Québec commémore les 31 ans de la tuerie de Polytechnique

La Presse canadienne, 6 décembre 2020

Les Québécois commémoraient dimanche les 31 ans de la tuerie de Polytechnique Montréal, mais le triste anniversaire prendra cette année une forme particulière parce qu’il n’y aura pas de rassemblement en personne pour souligner l’événement.

Une cérémonie commémorative virtuelle a eu lieu à l’heure du midi, avec la participation entre autres de l’une des survivantes de l’attentat, Nathalie Prévost, qui a fait un discours depuis la place du 6-Décembre-1989.

« Trente et un an après les premières demandes des étudiants de Polytechnique, juste en haut de la côte, et j’y étais, 31 ans et on demande encore des contrôles simples, des contrôles nécessaires », a-t-elle soutenu.

« Malheureusement, 31 ans après, c’est encore à faire, je suis encore là, debout, devant vous, à vous demander qu’ensemble comme Canadiens, on le demande au gouvernement. »

Lors de la cérémonie, un accent particulier a été mis sur la violence contre les femmes autochtones. Plusieurs ont notamment parlé de Joyce Elchaquan, cette Attikamek qui est morte à l’hôpital de Joliette après avoir subi des insultes dégradantes d’une infirmière et d’une préposée aux bénéficiaires.

« Depuis 1980, 1600 femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées. C’est l’équivalent de 37 000 Canadiennes ou 8000 Québécoises. Huit mille Cédrika Provencher passées inaperçues », a déclaré l’artiste innue Kathia Rock.

Comme les années dernières, des faisceaux de lumière seront projetés dans le ciel depuis le belvédère du mont Royal, mais le public n’est pas invité à y assister.

Il y a exactement 31 ans, quatorze femmes, dont beaucoup étaient des étudiantes en génie, ont été tuées et plus d’une douzaine de personnes ont été blessées dans une attaque motivée par la haine du tireur envers les femmes.

 À (RE)LIRE:

La commémoration des 30 ans : Montréal se souvient du féminicide
En vidéo | Regards croisés de Francine Pelletier et d’Aurélie Lanctôt sur la tuerie
L’éditorial de Marie-Andrée Chouinard: Polytechnique: déni de féminicide
En données | Portrait de la violence par arme à feu au Canada

Les politiciens au Québec et au Canada ont tenu à souligner le triste anniversaire, dimanche.

« La sécurité des femmes doit être le fondement de toute société. Encore aujourd’hui, trop de femmes, de filles et de personnes de diverses identités et expressions de genre font face à la violence et la discrimination au Canada et à travers le monde. Il nous reste encore beaucoup de travail à faire pour nous assurer qu’elles puissent vivre sans injustice, sans misogynie et sans peur », a déclaré le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, dans un communiqué.

M. Trudeau a rappelé que son gouvernement avait interdit cette année plus de 1500 armes à feu de style militaire, qui comprend l’arme utilisée à Polytechnique.

Le premier ministre François Legault a affirmé que le Québec avait un devoir de souvenir, mais aussi « un devoir d’action ».

« On doit continuer le travail pour prévenir et combattre toutes les formes de violence contre les femmes », a-t-il écrit sur Twitter.

Ma rencontre avec Chrystia Freeland et Federica Mogherini.

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© Martin Ouellet-Diotte, AFP | Une quinzaine de femmes ministres des Affaires étrangères posent pour une photo de famille, le 21 septembre 2018 à Montréal.

Par Serge St-Arneault

À l’initiative du Cabinet de la Ministre des Affaires étrangères du Gouvernement du Canada et avec l’aide du Service des communications et des relations publiques de la Polytechnique Montréal, j’ai été invité à assister à une commémoration voulue par les femmes ministres des Affaires étrangères réunies pour un sommet historique à Montréal les 21 et 22 septembre 2018.

Je suis allé au Parc du 6 décembre[1] tôt dans l’après-midi de samedi où allait se dérouler l’événement. Je me suis aussitôt dirigé près de la stèle illustrant la lettre ‘A’ et le nom de ma sœur Annie gravé sur le sol. La température était splendide. Sylvie Haviernick, la sœur de Maud, m’a ensuite rejoint. Ensemble, nous avons attendu l’arrivée de la ministre Chrystia Freeland ainsi que Federica Mogherini, représentante de l’Union européenne pour les Affaires étrangères. Notre rôle consistait à les accueillir officiellement. De fait, les premières voitures à apparaître ont été celles de la ministre des Affaires étrangères suédoise et de la République d’Andorre.

Tout compte fait, il y avait peu de monde présent si ce n’est les officiels du gouvernement et les journalistes tenus à distance. Sylvie et moi avons donc conduit nos hôtes le long du tracé séparant les 14 noms étalés sur le sol. Toutes les autres femmes ministres de leur différent pays ont suivi le cortège en déposant les roses blanches. J’accompagnais Federica Mogherini. Elle était très touchée par le lieu et la symbolique des fleurs. Elle a improvisé un discours après celui de Chrystia Freeland.

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Après la séance de photos, les voitures protocolaires noires étaient vites au rendez-vous pour le départ des femmes ministres. Federica Mogherini était elle-même un peu nerveuse car elle devait prendre son vol à 16h00 à l’aéroport en direction de New York dans le cadre de la 73e Assemblée générale de l’ONU.

─ « Je vous souhaite bon voyage. Revenez nous voir. Il y a beaucoup de belles choses à découvrir à Montréal. »

─ « Je n’y manquerai pas. Merci pour votre accueil. »

─ « Oh! Madame Freeland, permettez-moi de vous dire une chose. »

─ « Oui! Je vous écoute. »

─ « J’aime votre nom. Je l’aime vraiment. »

Elle s’est mise à rire. Freeland signifie littéralement ‘libre pays’.

─ « Nous savons tous que les discussions que vous menez pour un nouvel accord commercial avec les États-Unis ne sont pas faciles. Mais courage. Nous sommes fiers de vous. »

Je vous laisse le soin de deviner ce qu’elle m’a répondu. C’est maintenant un ‘secret d’État’. Je vous le dirai au creux de l’oreille mais pas plus. Enfin, je me suis surpris de lui dire à haute voix : « On vous aime! »

En un rien de temps, presque tout le monde était parti. Pourtant, il restait encore une voiture protocolaire. (Question : pourquoi sont-elles toujours noires?)

Je m’adresse alors au responsable du service protocolaire qui n’en finissait plus de nous remercier d’être venu.

─ « En tout cas, lui dis-je, si vous voulez que nous revenions, je pose une condition. »

─ « Laquelle, me dit-il. »

─ « Et bien! La prochaine fois, je veux moi aussi être reconduit à mon domicile dans l’une de vos voitures protocolaires noires. »

Je suis certain qu’il a déjà oublié.

Ma dernière bise, je l’ai donnée à Sylvie en nous promettant mutuellement de nous revoir bientôt. Puis, j’ai pris le métro à deux coins de rue plus loin.

Ceci dit, je suis donc profondément touché par le geste de ces femmes qui ont insisté pour se recueillir un bref moment au Parc du 6 décembre en mémoire de celles qui ont été tuées lors de la tragédie de la Poly il y aura bientôt 29 ans. Selon les reportages journalistiques, je note que l’élimination de la violence fondée sur le genre était l’un des thèmes discutés par ces femmes ministres. C’est leur désir d’établir une tradition de coopération. Je leur souhaite bonne chance.

Autres liens :

Huffpost - Chrystia Freeland

Canada : première réunion de femmes ministres des Affaires étrangères

Sommet historique de femmes ministres des Affaires étrangères à Montréal

Ottawa créera un poste d’ambassadeur pour les femmes, la paix et la sécurité

Monument 6 déc 01b

[1] La place du 6 décembre a été inaugurée en 1999 pour souligner le 10e anniversaire de la tragédie de la Polytechnique où 14 femmes ont été assassinées. Cette œuvre de l’artiste Rose-Marie Goulet est une initiative de la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence. Les matériaux sont choisis de telle sorte que le passant doit s’attarder pour déchiffrer le nom de la femme sur l’un des sept arcs de cercle. Annie St-Arneault et Maud Haviernick sont deux des quatorze victimes, sœurs de Serge et de Sylvie respectivement.

(Source :http://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/evenements/3899.html)