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Québec presse Ottawa d’agir

Photo: Jacques Boissinot (Archives) La Presse canadienne Québec demande à Ottawa d’en faire plus pour lutter contre la violence par armes à feu après la mort d’un adolescent de 16 ans à Montréal dimanche dernier. 

Marie Vastel et Alexandre Robillard, respectivement à Québec et à Washington, Le Devoir, 18 novembre 2021

Le premier ministre François Legault a pressé mercredi le gouvernement fédéral de lutter plus activement contre la violence par armes à feu.

M. Legault a fait cette déclaration trois jours après le décès d’un adolescent de 16 ans, à Montréal, qui a été tué par balle. « C’est terrible, a-t-il dit. Je ne reconnais plus Montréal. »

Juste avant de présider une réunion du Conseil des ministres, M. Legault a envoyé un message au gouvernement de Justin Trudeau. « Il faut qu’il en fasse plus », a-t-il affirmé, avant de s’engouffrer dans l’édifice. 

Quelques minutes plus tôt, la ministre québécoise de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, avait demandé au gouvernement fédéral de passer à l’action dans la lutte contre les armes à feu.

Mme Guilbault a souligné mercredi que le ministère fédéral de la Sécurité publique avait été pourvu de deux ministres lors de la dernière formation du Conseil des ministres de Justin Trudeau. Dans un point de presse, à Québec, Mme Guilbault a demandé à Ottawa d’être « un partenaire incontournable dans la lutte contre cette violence ».

« On comprend tous qu’il y a eu une élection, il y a deux ministres de la Sécurité publique qui ont été nommés en plus au fédéral, a-t-elle dit. Je leur ai envoyé une lettre avec les demandes du Québec, dont une très claire en ce qui concerne la violence liée aux armes à feu. J’ai fait une demande de rencontre et j’attends une réponse. »

Mme Guilbault a souligné que le contrôle des armes à feu commençait par le blocage de leur trafic aux frontières, et que la gestion des frontières est de compétence fédérale. Le Code criminel et les peines qu’il contient dépendent également des décisions des législateurs fédéraux.

« Quand tu possèdes une arme, légalement ou non, et que tu t’en sers, il faut que la peine que tu reçois soit proportionnelle avec la gravité de l’acte et surtout, à l’origine, dissuasive, a-t-elle dit. Si je sais que je peux me servir d’une arme et que je vais avoir quelques mois [de prison] comparativement à quelques années, ça peut peut-être en dissuader certains. »

Quant aux armes de poing, Mme Guilbault croit que le fédéral doit avoir une position claire. « La fameuse question des armes de poing, il y avait eu un projet de loi pour donner ça aux Villes, et les Villes étaient contre. Nous aussi. Il faut une fois pour toutes qu’il se positionne contre ou qu’il soit clair pour qu’on bannisse les armes de poing, avec une position claire là-dessus », a affirmé la ministre.

Elle a aussi fait valoir les efforts faits par le gouvernement québécois avec l’opération Centaure, qui regroupe 55 corps policiers du Québec dans la lutte contre la violence par armes à feu.

« Nos 55 corps policiers sont là-dessus, ils échangent du renseignement, il y a plein d’affaires qui se font, mais on a besoin du renseignement fédéral, a souligné la ministre. […] Il faut que le fédéral call la shot et décide qu’on déploie des ressources de la Gendarmerie royale du Canada. »

La prochaine mise à jour économique du gouvernement québécois prévoira des fonds pour des initiatives de prévention.

Au nom du gouvernement et en son nom personnel, Mme Guilbault a présenté ses condoléances à la famille de Thomas Trudel, tué par arme à feu dimanche sur la rue Villeray, à Montréal. Elle comprend l’angoisse que cet acte suscite chez les voisins et l’ensemble de la population, compte tenu de larecrudescence de la violence à Montréal ces dernières semaines. « Depuis dimanche soir, on est tous déchirés et un peu traumatisés par cette situation qui est survenue », a-t-elle dit avant de participer à la réunion du Conseil des ministres.

Nécessité d’agir

À Washington, à la veille d’un sommet avec ses homologues américain et mexicain, le premier ministre Justin Trudeau n’a pas précisé si le contrôle des armes à la frontière serait ajouté à l’ordre du jour de ses rencontres. « On a pris les mesures aux frontières, on a pris les mesures pour éliminer les armes d’assaut, a dit M. Trudeau en point de presse. Mais on comprend qu’il y a encore beaucoup plus à faire. »

Le premier ministre a répété son engagement électoral d’interdire les armes de poing. Son nouveau ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, est chargé de ce dossier.

« Cette tragédie à Montréal nous brise le cœur, a affirmé M. Trudeau. Surtout qu’elle suit plein d’autres tragédies [qui ont démontré] qu’il faut qu’on agisse. On va, comme je l’ai promis en campagne électorale, travailler avec Québec, avec Montréal, avec tout le monde qui veut bannir les armes de poing pour s’assurer que ça se fasse. »

La députée du Bloc québécois Kristina Michaud a demandé à M. Trudeau de déployer immédiatement toutes les ressources financières et humaines nécessaires pour enrayer le trafic d’armes aux frontières. « C’est hier qu’il fallait agir, a-t-elle déclaré dans un communiqué. Justin Trudeau doit malheureusement aujourd’hui réagir. »

Québec déclenche un Carcajou 2,0 à l’échelle provinciale

(Montréal) Ajout de 110 nouvelles ressources dont plus de 70 policiers, 90 millions de plus versés à la Sûreté du Québec (SQ), à des corps de police municipaux et au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, des agents de renseignements dans les réserves autochtones de Kahnawake et d’Akwesasne, le retour de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) au sein des escouades mixtes : Québec lance l’opération Centaure, une ambitieuse stratégie nationale de lutte aux armes à feu qui s’attaquera en priorité aux fournisseurs d’armes pour ne pas que Montréal devienne un autre Toronto.

DANIEL RENAUD et PHILIPPE TEISCEIRA-LESSARD, LA PRESSE, 24 septembre 2021

« C’est une force de frappe sans précédent. La violence liée aux armes à feu qui inquiète les citoyens et nos familles, c’est assez. À l’époque de la guerre des motards, l’escouade Carcajou, c’était 44 enquêteurs et 10 millions. Ce qu’on annonce aujourd’hui, c’est beaucoup plus important. C’est l’opération ultime de la lutte aux armes à feu », a déclaré la ministre de la Sécurité publique du Québec, Geneviève Guilbault.

Mme Guilbault a fait l’annonce de cette nouvelle stratégie nationale vendredi matin au Palais des congrès de Montréal, entourée de la ministre responsable de la métropole, Chantal Rouleau, de la directrice de la SQ, Johanne Beausoleil, du directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) Sylvain Caron, du président de l’Association des directeurs de police du Québec et directeur du Service de police de Laval, Pierre Brochet, et de plusieurs représentants de corps de police municipaux et autochtones.

Selon cette nouvelle stratégie, toutes les escouades mixtes actuellement en place pour lutter contre le crime organisé, telles l’Escouade nationale de répression du crime organisé (ENRCO) et les escouades régionales mixtes (ERM), et les équipes de lutte contre les stupéfiants et les armes que l’on retrouve déjà dans les villes, comme celles du SPVM, seront mises à contribution pour lutter contre les armes à feu, sous la supervision de la Sûreté du Québec.

L’équipe intégrée de lutte aux armes à feu (EILTA) est fusionnée à cette structure déjà existante pour s’attaquer principalement aux importateurs et aux fournisseurs d’armes à feu au Québec.

La Sûreté du Québec reçoit 74 des 90 millions supplémentaires annoncés vendredi matin. Avec cette somme, elle ajoutera plus de 60 policiers dans la lutte contre les armes à feu, dont un nouveau groupe tactique d’intervention (GTI). Les polices de Longueuil et de Laval recevront également quelques millions et pourront embaucher des policiers.

Le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale recevra 15 millions et pourra embaucher 15 employés, lui qui a de la difficulté à répondre aux demandes d’expertises pour toutes les armes à feu saisies au cours des derniers mois et années.

Avec la collaboration des corps de police locaux (Peacekeepers), un agent de renseignements sera en poste dans chacune des réserves d’Akwesasne et de Kahnawake, par où transitent beaucoup d’armes à feu illégales qui se retrouvent dans les rues de Montréal. C’est la première fois que les corps de police de ces deux réserves participent à une stratégie provinciale de lutte contre le crime organisé d’une telle envergure.

La police provinciale de l’Ontario, le Département de la sécurité intérieure des États-Unis et même les services frontaliers américains participent à l’Opération Centaure.

Les candidats à la mairie satisfaits

Même si l’essentiel des fonds annoncés vendredi matin ira à la SQ plutôt qu’au SPVM, les deux principaux candidats à la mairie de Montréal se sont dits satisfaits par l’annonce de Québec.

« Je suis très contente, a dit Valérie Plante, en marge d’une annonce électorale dans l’est de Montréal. Je vois ça d’un très bon œil que le gouvernement du Québec décide d’investir pour protéger les frontières, pour être beaucoup plus proactif. On y arrivera pas seuls. »

« Le fait que tous les corps policiers travaillent ensemble – dont ceux qui se trouvent sur des réserves autochtones – c’est une très très bonne nouvelle », a-t-elle ajouté.

La mairesse Plante ne participait pas à l’annonce de ce matin. Elle a expliqué qu’en campagne électorale municipale, le gouvernement du Québec préfère ne pas s’afficher aux côtés d’un des candidats.

« Je me réjouis de l’annonce du gouvernement du Québec qui se mobilise pour enrayer la violence par armes à feu », a réagi Denis Coderre dans une déclaration transmise par écrit. « Encore une fois, la Ville n’assume aucunement son leadership en matière de lutte contre la violence. Cette stratégie nationale démontre l’urgence d’agir pendant que la mairesse Plante se met la tête dans le sable. »

« Il y a une disproportion inquiétante entre la répression et la prévention dans l’approche de la ministre Guilbault. La ministre vient de mettre plus de 90 millions sur la table pour soutenir les corps policiers, mais n’a annoncé aucune nouvelle somme pour soutenir le milieu communautaire et les intervenants qui travaillent auprès des jeunes. C’est incompréhensible », a pour sa part déclaré le député de Laurier-Dorion Andrés Fontecilla, de Québec solidaire.

« L’augmentation des actes de violence commis au cours des derniers mois est assez inquiétante. C’est pourquoi on ne peut que saluer la présente stratégie gouvernementale qui permettra notamment de mieux outiller nos corps policiers et surtout d’agir en amont et en étroite collaboration avec nos organismes communautaires. », a notamment réagi le président de l’Union des municipalités du Québec et maire de Gaspé, Daniel Côté.

Sur Twitter, la Fraternité des policiers et policières de Montréal a salué « le leadership et la vision de la ministre de la Sécurité publique et du gouvernement du Québec dans la lutte contre la violence par armes à feu, une stratégie porteuse laissant espérer des résultats notables ».

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

L’AJOUT DES RESSOURCES

Sûreté du Québec : 74 millions

  • 78 policiers et civils
  • Un nouveau groupe tactique d’intervention
  • Des civils en soutien aux enquêtes

Service de police de Laval : 5,2 millions

  • 5 enquêteurs

Service de police de l’agglomération de Longueuil : 3 millions

  • 4 enquêteurs

QUELQUES CHIFFRES

Selon la SQ, 29 % des armes à feu illégales saisies au Québec proviennent de la province et 44 % de l’extérieur du Québec et de l’Ontario

Selon une compilation de La Presse, au moins 96 évènements de coups de feu étaient survenus à Montréal cette année, au 9 septembre.

Selon le SPVM, 400 armes à feu ayant servi à des crimes avaient été saisies à Montréal cette année, au 31 août dernier.

Centaure est un acronyme formé des mots : Coordination, efforts, national, trafic, arme, unifiée, répression et enquête