Dans le monde rural des années 1930 au Québec, les discours des politiciens attiraient l’attention de leurs électeurs avec la promesse de l’électrification des campagnes en criant : « Électeurs, électrices, électricité ! » Aujourd’hui, comme au mois de décembre 2022, un appel nous rejoint : « Bienfaiteurs, bienfaitrices, électricité ! » Même besoin d’éclairage grâce aux technologies actuelles des panneaux solaires.
Le premier appel nous venait d’un confrère du Nigéria qui travaille en Ouganda. En voici un autre proposé à votre générosité par Erasto Shayo, un confrère originaire de Tanzanie, en mission au Nigéria à d’Ibadan (ville de 3 millions et demi d’habitants) dans le quartier défavorisé d’Agbowo aux multiples problèmes de pauvreté, d’insécurité, de vie dans des taudis inadéquats…
Erasto Shayo, MAf
Une équipe de trois Pères Blancs (MAfr) est à l’œuvre dans une paroisse. Voici ce que nous écrit le curé, Erasto Shayo.
Comme équipe missionnaire à la Paroisse Saint-Thomas, nous ne pouvions restreindre notre action à l’administration des sacrements et à la célébration des messes. Au cœur de notre foi, il y a cette parole de Jésus : « J’ai donné ma vie – mon corps, mon sang – pour qu’ils aient une vie de qualité. Faites de même, en mémoire de moi. »
Avec notre équipe MAfr, les leaders de notre paroisse organisent différentes activités pour soutenir le développement humain, personnel et communautaire. Nous travaillons ainsi à la formation continue des leaders et à promouvoir la justice et la paix dans notre quartier.
Nous sommes engagés dans une bataille pour la protection de la planète qui est notre maison commune. Pour nous, ici, cela signifie militer pour plus de salubrité.
Nous offrons aussi des salles aux étudiants des écoles et universités pour qu’ils puissent étudier, faire leurs devoirs, apprendre leurs leçons. Sans électricité, nous ne pouvons pas les aider et le faire en toute sécurité après le coucher du soleil en début de soirée.
Branchement illégal
Mais, comment avoir accès à l’électricité ? Voyez la photo ci-jointe à gauche. Dans le quartier, chacun se branche illégalement au réseau. Résultat; surcharge et coupures presque continuelles!
Nous avons deux petites génératrices qui fonctionnent à l’essence. En vérité, non seulement nous n’avons pas assez d’argent, mais les stations-service sont souvent en rupture de carburant.
Nous avions un système rudimentaire de panneaux solaires avec batteries pour accumuler l’électricité. Vous le dirais-je ? La foudre est tombée sur nos installations, et nous devons penser à une installation plus performante et plus sécuritaire !
Amis et bienfaiteurs du Canada, je vous présente ce projet d’environ $19,000 dollars canadiens. Nous avons besoin d’électricité pour accomplir notre mission. Oui, il y a des projets plus spectaculaires dans le monde. Mais à Ibadan, quartier Agbowo, selon nos besoins, c’est l’achat de panneaux solaires et de batteries. Nous nous rappelons que dans la mission, il faut parfois « donner du poisson » pour nourrir l’affamé. Mais mieux encore, il faut lui « apprendre à pêcher. »
Le développement passe par l’éducation des jeunes (photos ci-dessous). Les jeunes hommes et femmes de notre paroisse pourront le faire si nous leur offrons des salles d’études bien éclairées et sécuritaires la nuit.
The magazine « Letter to our Friends » has had a facelift. The year 2022 marks a new stage in our desire to seize new opportunities in the context of the Covid-19 pandemic. The Missionaries of Africa in Canada, like you and the rest of humanity, are wondering about the future of our society, of our world.
Fatjer Robbin Simbeye in Tunisia
The earth continues to turn and so do we. Instead of turning on ourselves, like a whirlwind, our gaze is pointed towards other horizons. In this issue of The Letter to Friends we will go to Tunisia to meet an exceptional community made up of Christians and Muslims where ecumenism and religious dialogue are lived daily with respect for all.
Artistic expression is an extraordinary way to illustrate the precious gift of love. It is a collective wealth of almost infinite variety. The African world present in our country now has a place to disseminate this wealth. The Afromusée (see on page 6) will build new bridges towards the recognition and enhancement of the history of Afro-descendants, which dates back more than three centuries in Canada.
Sculpture by James Samikwa from Malawi
African art is inspired and inspiring. On the cover page and on page 7, you will notice an exceptional image of Christ; a sculpture by James Samikwa from Malawi. The finesse of the details illustrates the cosmic power par excellence of the healing Christ.
The gift of hope is also to be sought constantly. Read the extraordinary struggle of Sister Marie Stella from Togo. This same hope is celebrated on the occasion of the 150th anniversary of the Basilica of Our Lady of Africa located in Algiers. Once again, this historic gift builds bridges between religions. This sanctuary promotes dialogue and sharing between Christians and Muslims. The same is true from an intellectual point of view with the creation of a new bilingual magazine focusing on Islamic-Christian studies in Africa.
The spiritual gift that we received from our founder, Cardinal Lavigerie leads us to be sensitive to the realities of today’s world and to dare to constantly modify or reassess our mission.
It is in this respect that the encyclical of Pope Francis entitled Fratelli Tutti is particularly significant for us. Despite the numerous confinements, a consequence of the spread of Covid-19, we insist on building bridges.
Finally, we propose today to support a commendable initiative for the protection of albinos in Bukavu in the Democratic Republic of Congo. A lot of effort and ardor have been invested in this project, which has already made it possible to restore dignity to many people who have been discriminated against.
Let us persist together in earnestly seeking the greatest gifts.
Le magazine La lettre aux Amis fait peau neuve. L’année 2022 marque une nouvelle étape dans notre désir de saisir de nouvelles opportunités dans le contexte de la pandémie de la Covid-19. Les Missionnaires d’Afrique au Canada, tout comme vous et le reste de l’humanité, s’interrogent sur le devenir de notre société, de notre monde.
Père Robbin Simbeye en Tunisie.
La terre continue de tourner et nous aussi. Au lieu de tourner sur nous-mêmes, comme un tourbillon, notre regard est pointé vers d’autres horizons. Dans ce numéro de La lettre aux Amis nous irons en Tunisie faire la rencontre d’une communauté exceptionnelle composée de chrétiens et de musulmans où l’œcuménisme et le dialogue religieux se vivent au quotidien dans le respect de tous.
L’expression artistique est une forme extraordinaire pour illustrer le précieux don de l’amour. Il s’agit d’une richesse collective d’une variété presque infinie. Le monde africain présent dans notre pays a maintenant un lieu pour diffuser cette richesse. L’Afromusée (voir la page 6) permettra de bâtir de nouveaux ponts vers la reconnaissance et la valorisation de l’histoire des afrodescendants qui remonte à plus de trois siècles au Canada.
Sculpture de James Samikwa du Malawi.
L’art africain est inspiré et inspirant. Sur la page couverture et à la page 7, vous remarquerez une image exceptionnelle du Christ ; une sculpture de James Samikwa du Malawi. La finesse des détails illustre la puissance cosmique par excellence du Christ guérisseur.
Le don de l’espérance est aussi à rechercher sans cesse. Lisez le combat extraordinaire de sœur Marie Stella du Togo. Cette même espérance est célébrée à l’occasion du 150e anniversaire de la basilique Notre-Dame d’Afrique situé à Alger. De nouveau, ce don historique lance des ponts entre les religions. Ce sanctuaire favorise le dialogue et le partage entre chrétiens et musulmans. Il en est de même d’un point de vue intellectuel avec la création d’un nouveau magazine bilingue axé sur les études islamo-chrétiennes en Afrique.
Le don spirituel que nous avons reçu de notre fondateur, le Cardinal Lavigerie nous porte à être sensibles aux réalités du monde actuel et à oser modifier ou réévaluer sans cesse notre mission.
C’est à ce titre que l’encyclique du pape François intitulée Fratelli Tutti est particulièrement significative pour nous. Malgré les nombreux confinements, conséquence de la propagation de la Covid-19, nous insistons à bâtir des ponts.
Finalement, nous vous proposons aujourd’hui de soutenir une louable initiative pour la protection des albinos à Bukavu en République Démocratique du Congo. Beaucoup d’efforts et d’ardeur sont investis dans ce projet qui permet déjà de redonner la dignité à de nombreuses personnes discriminées.
Persistons ensemble à rechercher avec ardeur les dons les plus grands.
L’article publié à l’intention des membres de la Société des Missionnaires d’Afrique de partout dans le monde.
Il n’est pas si simple de concevoir l’hospitalité solidaire comme fondement spirituel de nos communautés interculturelles. Cette notion apparaît trop abstraite à première vue. Pourtant, je suis convaincu de son exactitude depuis ma participation à l’atelier « Vivre en communauté interculturelle comme témoignage apostolique aujourd’hui » qui s’est déroulé à Rome en 2019.
« Plus que jamais », ai-je écrit après la session dans le Petit Écho, « nous tenons compte de notre diversité culturelle perçue non pas comme une menace, mais plutôt comme une richesse. Notre désir profond est de témoigner de notre unité dans la diversité. »
Un exemple particulier : le Centre Afrika
Le Centre Afrika a ouvert ses portes en 1988 au sous-sol de la maison des Missionnaires d’Afrique à Montréal dans le but de favoriser l’intégration et la participation des Africains à leur société d’accueil. Depuis lors, de nombreuses associations collaborent à la vitalité du centre qui sert de relais auprès des nouveaux arrivants dans le but de les orienter vers les services dont ils ont besoin grâce à un réseau tissé au long des années avec d’autres organismes privés, communautaires et gouvernementaux.
Les groupes qui viennent au Centre Afrika sont très variés. Certaines associations représentent un pays africain déterminé, d’autres s’orientent vers des formes d’engagement. Il y a aussi des groupes de danse et des chorales. L’expérience montre qu’il n’y a pas vraiment d’interaction entre ces différents groupes. À vrai dire, le Centre Afrika est avant tout un agréable lieu de service décoré avec des œuvres d’art africains qui plaît beaucoup. Sa qualité d’accueil est particulièrement appréciée.
Changement nécessaire
Il faut pourtant aller plus loin et bâtir des ponts. Mon rêve est de favoriser le développement d’une appartenance basée sur l’entraide mutuelle entre les individus et les associations grâce à l’émergence d’une hospitalité solidaire qui favorisera l’acceptation d’une dépendance réciproque comme fondement identitaire.
Ainsi, l’association togolaise ne se limitera pas aux seuls Togolais vivants à Montréal pour soutenir une levée de fond pour une école au Togo. Toutes les autres associations se joindront à cet effort collectif. Un autre jour, nous assisterons ensemble à une conférence organisée par une association algérienne. Il en sera de même pour participer à un spectacle organisé par l’une de nos chorales. Nous sommes à la recherche d’un cadre où la pluralité devient le ciment unificateur du développement identitaire qui relie aussi bien les individus que les groupes.
L’identité « Centre Afrika »
Je souhaite que le Centre Afrika développe sa propre identité basée sur une interculturalité compatible avec une spiritualité de la communion. Celle-ci se doit d’être une démarche constructive favorisant la complémentarité. Les groupes qui se réunissent au Centre Afrika ne se menacent pas. Au contraire, ils deviennent un don réciproque. En élargissant notre cercle de fraternité, nous avons alors une chance de voir un jour le Centre Afrika devenir véritablement un lieu d’hospitalité solidaire.
Nos communautés missionnaires
La session que nous avons vécue à Rome s’adressait avant tout à nos communautés missionnaires dites internationales. Elles sont aussi interraciales.
Voilà une excellente opportunité pour approfondir notre « identité missionnaire » dans le cadre d’une spiritualité interculturelle. Nos communautés peuvent-elles devenir des lieux d’hospitalité solidaires ?
Comme je le mentionnais l’année dernière, nous vivons l’hospitalité depuis notre fondation. De plus, la solidarité fait déjà partie de notre façon de vivre. C’est largement inscrit dans nos Constitutions. Pouvons-nous alors allier d’une manière plus créative ces deux concepts qui constituent la base de l’interculturalité?
Nos limites
Mon expérience missionnaire m’a appris qu’il n’est pas si facile de se parler, de partager notre vécu entre confrères. Certes, nous nous répartissons le fardeau du travail apostolique, vivons parfois dans des conditions de vie difficile ou tendue. Heureusement, nous nous soutenons dans nos moments de prière. Par contre, que savons-nous vraiment de nos confrères ?
Comme pour tout autre être humain, inévitablement, nos stéréotypes et préjugés reposent sur des codes culturels liés à nos expériences collectives particulières avec la nature, le temps, l’espace, la maladie, la mort, le pouvoir, les traumatismes historiques, etc. La variété de nos comportements culturels est presque infinie.
La chance que nous avons d’être ce que nous sommes
Dès leur origine, les Pères Blancs européens ont dû relever les défis du « vivre ensemble » au-delà des guerres dévastatrices du XXe siècle. Pour en avoir fait l’expérience moi-même, il y a véritablement un choc culturel entre l’Amérique et l’Europe, plus profond à certains égards que celui entre l’Amérique et l’Afrique. Depuis maintenant trois ou quatre décennies, les Pères Blancs s’africanisent. À eux, s’ajoutent aussi nos confrères indiens et philippins. Quels défis !
Pourtant, nous avons fait la preuve, au-delà de nos erreurs et maladresses, que nous pouvons vivre en communautés interculturelles. En effet, nous avons développé un esprit de famille unique inspiré de notre fondateur, Charles Lavigerie, qui a insisté sur notre fameux « esprit de corps ». Nous pouvons à juste titre en être fiers.
Et nous aujourd’hui ?
Lavigerie n’a pas parlé en termes d’interculturalité, car ce mot n’existait pas. Ce qu’il a préconisé est tout de même similaire. Notre spiritualité en est une de communion fraternelle respectueuse des différences culturelles. Être disciples du Christ présuppose que nous sommes tous complémentaires les uns des autres. Comment cela peut-il alors s’exprimer concrètement au sein de nos communautés missionnaires majoritairement composées en Afrique de confrères africains et indiens? Comment peuvent-elles devenir des lieux d’hospitalité solidaire ?
Les fêtes de fin d’année 2018
ont une résonance particulière pour les Sœurs Blanches et les Pères Blancs
d’Afrique. Depuis le 8 décembre 2018 et jusqu’au 8 décembre 2019, ils célèbrent
leurs 150 ans d’existence. Ils soulignent un siècle et demi à servir les
Africains tant dans leur continent qu’ailleurs dans le monde. Retour sur une
aventure qui devait être ponctuelle et qui a su se perpétuer. Mais pour combien
de temps encore?
En 1868, Mgr Charles Lavigerie, alors archevêque d’Alger, crée la Société des Missionnaires d’Afrique. Outre son travail pastoral auprès des chrétiens algériens, le prélat français arrivé un an plus tôt, s’engage dans des causes sociales et humanitaires. L’Algérie est confrontée à une redoutable épidémie de choléra doublée d’une famine qui décime les populations. L’ex-évêque de Nancy sen fait une cause prioritaire. Il sollicite toutes les bonnes volontés disponibles. Des hommes et des femmes d’Église de France, des États-Unis, de plusieurs autres pays d’Europe et bien entendu Canada seront appelés en renfort. En tout, plus de 650 Canadiens répondront à l’appel de Charles Lavigerie.
« La femme est à l’origine de
tout puisqu’elle est mère ».
Conscient de ce que seules des femmes-apôtres seraient en
mesure de nourrir et d’élever les orphelins qui affluent à l’évêché, en 1869,
Mgr Lavigerie crée, en collabora avec Mère Marie Salomé, la Congrégation des Sœurs Missionnaires Notre-Dame d’Afrique. « Malgré le zèle des
Missionnaires, dira Charles Lavigerie, leurs efforts ne produiront jamais des
fruits suffisants s’ils ne sont pas aidés par des femmes-apôtres auprès des
femmes…Ce que les hommes ne peuvent faire, les femmes le peuvent. On les admet
avec facilité, même avec joie. La femme est à l’origine de tout puisqu’elle est
mère ».
Pour des raisons d’efficacité, mais aussi d’humilité et
d’acceptabilité, ces religieux adoptent les mœurs locales. Ils apprennent à
parler arabe. Pour Mgr Lavigerie, «Cette étude est d’une nécessité telle que
l’on peut dire qu’elle prime tout le reste car sans la connaissance de la
langue, il est impossible de ne rien faire comme apostolat auprès des
Africains. » Même entre eux, les Missionnaires doivent parler plus entre eux
que la langue des tribus au milieu desquelles ils résident » vont donc manger
et s’habiller comme des Arabes ou des Kabyles, etc.
D’ailleurs, c’est en raison de leur habillement, en
particulier de la tunique algérienne blanche qu’ils vont se faire appeler
«Pères Blancs» et «Sœurs Blanches». Les deux instituts au sein desquels ils œuvrent
porteront les mêmes surnoms. À partir de à partir de 1894, lorsqu’ils étendent
leurs activités à l’Afrique subsaharienne, ces deux instituts deviendront
officiellement la Société des Missionnaires d’Afrique et la Congrégation des
Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique.
Lutte contre l’esclavage
Confiant en l’avenir des Africains, Mgr Charles Lavigerie s’est battu pour l’abolition de l’esclavage. Pour cela, il a pu compter sur quelques correspondants et bienfaiteurs au Canada. À la fin des années 1880, il est le grand artisan de la prise de position ferme de l’Église catholique dans la condamnation de l’esclavage.
Il prend son bâton de pèlerin afin de sensibiliser les
Européens sur ce fléau qu’est l’esclavage. Sa campagne porte fruit puisque sous
l’impulsion des Britanniques ayant saisi la pertinence de son message, des
représentants de seize puissances vont débattre du sujet.
Et en 1890, ces puissances vont signer la Convention de
Bruxelles destinée à « mettre un terme aux crimes et aux dévastations
qu’engendre la traite des esclaves africains, afin de protéger efficacement les
populations aborigènes de l’Afrique et d’assurer à ce vaste continent les
bienfaits de la paix et de la civilisation ».
Une œuvre qui a survécu à son
créateur
Deux ans plus tard, le 26 novembre 1892, Mgr meurt à
Alger. Mais son œuvre, à travers les Pères Blancs et les Sœurs Blanches, se
perpétue. À l’actif des premiers, on peut citer des paroisses, des hôpitaux,
des écoles techniques, des séminaires, des dictionnaires, des journaux, la
formation des prêtres, le développement et j’en passe.
Les secondes, les Sœurs Blanches, ont quant à elles
notamment contribué à la fondation de 22 congrégations religieuses féminines en
Afrique. Elles ont œuvré dans l’éducation scolaire et professionnelle, les
soins infirmiers, la pastorale et le développement. À l’instar des Pères
Blancs., les Sœurs Blanches privilégient également le dialogue islamo-chrétien.
Souvenons-nous que le fondateur du mouvement, le Cardinal
Lavigerie, avait tissé de fortes relations avec les musulmans au Liban, en
Syrie et en Afrique du nord. Ensuite, la congrégation a vu le jour et s’est
développée en Algérie, c’est-à-dire en milieu arabo-islamique. Donc, le
rapprochement interreligieux est naturel pour ces missionnaires.
Comme leurs homologues masculins, les Sœurs Blanches ont
aussi africanisé leur couleur. Burundaises. Rwandaises, Congolaises,
Tanzaniennes et j’en passe, ont intégré la congrégation. Les postes de
supérieures générales, maîtresses des novices, économes jadis occupés par des Européennes
ou des Canadiennes, sont progressivement passées aux mains des Africaines.
Hors d’Afrique, Au Canada par exemple, ces missionnaires
travaillent sans relâche auprès des Africains : aide à l’intégration,
soutien aux pauvres et aux migrants, création d’un espace culturel accessible à
tous, expositions, conférences, tables-rondes, amélioration du vivre-ensemble,
etc.
La crise des vocations :
l’épée de Damoclès
En 2018, outre l’Afrique, Sœurs Blanches et Pères Blancs
sont toujours actifs en Amérique du Nord, en Amérique latine, en Asie et en
Europe. Mais leurs effectifs sont en baisse constante. En 2013, on comptait 750
Sœurs blanches. Deux ans plus tard, en 2015, elles n’étaient plus que 727. En
moins de quarante ans, leurs effectifs ont été divisés par trois.
Résultat : la moyenne d’âge des sœurs en Belgique par exemple était de 82
ans en 2011. C’est désormais l’Afrique qui pourvoit à la demande.
Chez les Pères Blancs la tendance est similaire. Au 1er janvier 2018, ils étaient 1,210 soit 22
membres de moins qu’un an plus tôt. À titre de comparaison, dans les années 60,
ils étaient plus de 3000. En 1998, ils n’étaient plus que 2098. Si on prend les
Prêtres avec Serment perpétuel qui constituent le plus gros des effectifs, ils
sont passés de 1,105 en 2017 à 1,066 en 2018. Seuls l’Asie (16) et le continent
africain (14) ont connu une légère hausse de leurs effectifs entre 2017 et
2018.
Avec la crise des vocations religieuses que le Pape
François en personne qualifiait en 2017 de véritable «hémorragie» qui «affaiblit
la vie consacrée et la vie même de l’Église», le principal défi auquel sont
confrontées la Société des Missionnaires d’Afrique et les Sœurs Missionnaires
de Notre-Dame d’Afrique, c’est le renouvèlement de leurs effectifs. La survie
de ce mouvement qui célèbre son 150e anniversaire
en dépend.
Fondée en 1868 par le cardinal français Charles Lavigerie, la communauté des Missionnaires d’Afrique, plus connue sous le nom de Pères Blancs, envoie dès 1875 des émissaires à Montréal et à Québec chercher du financement. C’est le début d’une grande aventure qui verra plus de 650 pères et frères canadiens revêtir une soutane blanche pour porter les idéaux d’un christianisme humaniste en terre africaine. Michel Désautels reçoit l’ancien supérieur provincial des Missionnaires d’Afrique, le père Gilles Barrette.
Gilles Barrette
Père Gilles Barette, ancien supérieur provincial des Missionnaires d’Afrique (Pères blancs) Photo : Radio-Canada / Mathieu Arsenault
La Mission de Notre-Dame d’Afrique située près du Parc olympique à Montréal était littéralement ‘noire de monde’ à la messe des Rameaux que je présidais au mois de mars dernier. Cette église ouvre ses portes à toute la communauté africaine de l’île de Montréal. Débutée vers 11h00, cette célébration liturgique s’est terminée à 13h30 sans que personne ne s’en étonne. Il est vrai que la lecture de la passion de Jésus-Christ ce jour-là était longue.
Néanmoins, malgré le caractère dramatique des lectures, les chants et leurs rythmes ont ravivé les ferveurs. J’ai vécu de nombreuses fois ce genre de célébration tout au long de mes années en Afrique. Le temps alloué n’est jamais minuté à la seconde comme c’est souvent la réalité dans notre société d’ici. En effet, nous insistons sur la bonne utilisation de notre temps en citant le proverbe: « le temps, c’est de l’argent ». Le temps devient une commodité précieuse. C’est le cas lorsque nous l’offrons pour un ami, un membre de la famille, voire même un étranger. Et que dire de la louange ou de la prière offerte au Seigneur?
C’est ce que mes sœurs et frères africains m’ont enseigné. Là réside la forme du soutien communautaire qui s’exprime aussi bien dans le deuil qu’au moment des réjouissances. Je leur serai éternellement reconnaissant. Ce jour-là, à la messe des Rameaux, je me suis surpris moi-même à leur dire que je me sentais être « un Africain de race blanche ». Et pourquoi pas? La couleur de la peau n’est qu’un accident de la nature. Mais ce qui construit l’identité est d’un autre ordre, celui du cœur. Ce rapprochement des cœurs se vit depuis 150 ans au sein des Missionnaires d’Afrique.
Nous le célébrerons plus particulièrement dans les prochains mois. Notre joie est de savoir qu’une autre célébration aura lieu dans 150 ans grâce à la croissance de notre Société missionnaire qui forme présentement 500 jeunes qui désirent vivre le même charisme missionnaire que celui de nos prédécesseurs. Réjouissons-nous et bon anniversaire!
La Province des Amériques : une Province – quatre Secteurs
En décembre 2018, la Société des Missionnaires d’Afrique célèbrera le 150e anniversaire de sa fondation. Plusieurs d’entre vous se demande peut-être à quand remonte la présence des Pères Blancs au Canada et comment nous sommes arrivés à parler aujourd’hui d’une Province des Amériques et de quatre Secteurs. Voici quelques éléments de réponse :
1875 : à cette époque, Mgr Lavigerie (notre Fondateur) envoie des Pères Blancs au Québec pour parler du projet missionnaire africain et pour sensibiliser les gens aux besoins de sa nouvelle fondation.
1886 : le 12 août 1886, John Forbes, né à l’Île Perrot (Montréal), quitte le Canada pour Alger afin de commencer sa formation missionnaire chez les Pères Blancs. Il a 22 ans. Le 25 septembre 1888, il prononce son serment missionnaire. Il est ordonné prêtre le 6 octobre 1888.
1900-1901 : premier Père Blanc canadien, le Père Forbes est envoyé par la Société au Canada. En mars 1901, Mgr Bégin, archevêque de Québec, lui donne l’autorisation d’ouvrir une maison. Elle sera la première maison de formation des futurs Pères Blancs canadiens. Le Père John Forbes quittera le Canada pour l’Afrique en 1914. D’autres maisons seront ouvertes à Québec, Montréal, Sherbrooke, St-Boniface, Ottawa, Toronto, etc.
1929 : Mgr Joseph Shrembs, évêque du diocèse de Cleveland (Ohio-USA), ami de Mgr Forbes, accepte de recevoir les Pères Blancs dans son diocèse.
1943 : le Canada devient officiellement la Province de la Société des Missionnaires d’Afrique en Amérique.
1948 : la Province des États-Unis est créée. Jusqu’en 1997, se succéderont sept provinciaux.
1984 : la Société des Missionnaires d’Afrique s’implante au Mexique et au Brésil. Ces nouvelles fondations dépendent directement du Conseil général à Rome.
1997 : les effectifs diminuant, les Missionnaires d’Afrique décident d’unifier le Canada et les États-Unis en une seule Province. Le 1er juillet 1997, la Province du Canada et celle des États-Unis deviennent une seule entité appelée la Province de l’Amérique du Nord.
2006 : le 1er juillet, le Mexique est officiellement rattaché à la Province de l’Amérique du Nord.
2008 : Pour plus d’efficacité, le Conseil général décide d’intégrer les fondations du Mexique et du Brésil au Canada et aux États-Unis en créant une nouvelle entité appelée la Province des Amériques. Elle comprend alors 3 secteurs : le Canada, les États-Unis et le Mexique-Brésil.
2012 : le Brésil, est détaché du Mexique et devient le 4e secteur. Chez les Missionnaires d’Afrique les structures ne sont pas un absolu. Elles sont toujours au service de la mission et du bien-être des membres. Elles sont donc appelées à s’ajuster aux réalités du moment. Que nous réserve l’avenir ?
L’Équipe responsable de la « Lettre aux Amis », Jacques Poirier, Marc Beaudry et Serge St-Arneault