Par Serge St-Arneault, M.Afr
J’ai eu l’opportunité de participer à un colloque organisé par l’Archidiocese de Montréal du 14 au 16 mai dernier. Ce colloque a été rendu possible en collaboration avec le Grand Séminaire de Montréal sur les enjeux sociaux et ecclésiologiques de l’accueil des migrants et réfugiés dont le thème était : « Plus de ponts moins de Murs ».
Le discours qui se propage autour de nous est souvent celui-ci : accueillons les migrants tant qu’ils sont utiles et productifs. Cela laisse sous-entendre qu’ils seront expulsés ou rejetés après usage comme à la manière d’un objet qui a perdu son utilité ou sa valeur.
Pourtant, nous bénéficions largement par l’accueil des migrants et des réfugiés bien au-delà des craintes alimentées par certains courants idéologiques et par certains politiciens. Cette peur est régulièrement associée à notre perte ou appauvrissement identitaire. Cela est particulièrement le cas ici au Québec.
Or, le Pape François milite pour la « globalisation des solidarités » en prenant comme principe qu’il n’y a pas d’amour sincère sans une part de sacrifice. L’esprit chrétien incite à offrir un espace d’accueil aux peuples étrangers et à leurs expressions culturelles. C’est cette attitude qui permet une croissance bénéfique de sa propre identité appelée à se transformer, à mûrir, à s’épanouir.
En effet, aucune identité culturelle n’est statique. Chaque identité, personnelle et collective, s’enrichit par l’accueil de l’autre. Étrangement, c’est la société d’accueil qui s’enrichit le plus.
La question que nous devrions nous poser est celle-ci : comment puis-je faciliter l’accueil de l’étranger? Agir ainsi, c’est un peu comme court-circuiter le langage alarmiste et négatif d’une fictive invasion migratoire. La préoccupation du croyant devrait être celle du bien commun pour tous où le « vivre ensemble » inclut tout le monde.
Cela nécessité le courage de réviser nos modèles économiques pour favoriser l’intégration des immigrants et réfugiés. Ce problème est avant tout mental et spirituel. Les croyants doivent se rappeler sans cesse que tout être humain, de quelque horizon culturel il provient, est un enfant de Dieu.
L’enjeu migratoire est une question difficile. La Bible en relate de nombreux exemples. Jésus lui-même a dû réajuster son identité juive dans ses nombreuses rencontres avec les non-juifs. L’épisode de la Sino-Phénicienne (Jn, 4, 1-42) montre finalement que Jésus a consenti à changer son regard vers cette femme et envers les Samaritains. Il a fait preuve d’universalité.
L’avenir de nos communautés chrétiennes au Québec, et dans une certaine mesure pour l’ensemble des Québécois que l’on nomme « de souche », réside dans leur capacité à élargir l’espace d’accueil pour favoriser l’éclosion de « communautés en mouvement ». Là est la vie. Là se trouvent des lieux d’espérance. Il n’y a plus alors de place pour une pensée sclérosée, repliée par la peur, paralysée par les discours trompeurs des alarmistes de tout genre. Pratiquer l’hospitalité est fondamentalement un signe sacramentel. Cela veut dire que le Christ se dévoile dans le visage de l’étranger accueilli.
QUESTIONS :
- Comment pourrions-nous mieux respecter la dignité humaine sous toutes ses formes, incluant l’immigrant et le réfugié.
- Comment devrions-nous promouvoir le bien commun pour les gens d’ici et ceux qui viennent d’ailleurs?
- Comment militer pour une meilleure répartition des richesses planétaires pour permettre à tous de vivre décemment là où ils habitent?
- Pouvons-nous ici et ailleurs militer en faveur de l’option préférentielle pour et avec les pauvres?
- Comment soutenir les principes démocratiques de toutes les sociétés en soutenant une action citoyenne engagée?
- Comment enraciner la solidarité au plan moral où « tous deviennent responsables de tous » dans la lutte pour la justice sociale qui inclut la dénonciation des abus des personnes en autorité et la lutte contre la traite humaine.
La réponse à toutes ces questions émerge d’un seul principe : la rencontre respectueuse, l’accueil juste et sincère de l’autre, particulièrement de l’étranger et du réfugié.
Extrait du site internet de l’Archidiocèse de Montréal :
Grâce à la présence du Père Fabio Baggio, sous-secrétaire de la Section « Migrants et Réfugiés » du Dicastère pour le Service de développement humain intégral, de nombreux prêtres et participants ont eu la possibilité de réfléchir sur les 4 verbes que le pape François nous propose face aux défis complexes que représentent les flux migratoires contemporains pour les autorités politiques, la société civile et l’Église, qui exigent que l’on réponde de façon encore plus urgente et de manière coordonnée et efficace.
Ces verbes sont :
ACCUEILLIR :
Signifie avant tout offrir aux migrants et aux réfugiés un accès sécuritaire et légal dans les pays d’accueil. Un changement d’attitude est urgent, pour surmonter l’indifférence et préférer aux craintes une attitude généreuse d’accueil envers ceux qui frappent à nos portes.
PROTÉGER :
Désigne une série d’actions pour la défense des droits et de la dignité des migrants ainsi que des réfugiés, indépendamment de leur statut migratoire. Protéger ces frères et sœurs est un impératif moral à traduire en adoptant des instruments juridiques, internationaux et nationaux, clairs et pertinents.
PROMOUVOIR :
Veut dire la mise en place d’un environnement où les migrants, les réfugiés ainsi que les communautés d’accueil peuvent s’épanouir selon toutes les dimensions composant l’humanité voulue par le Créateur. La promotion humaine des migrants et de leurs familles commence par les communautés d’origine, là où doit être garanti, avec le droit de pouvoir émigrer, également le droit de ne pas devoir émigrer, c’est-à-dire le droit de trouver dans sa patrie des conditions qui permettent une réalisation digne de l’existence.
INTÉGRER :
Corresponds à l’occasion d’enrichissement interculturel présenté par les migrants et les réfugiés. L’intégration n’est pas l’assimilation qui conduit à supprimer ou à oublier sa propre identité culturelle. Le contact avec l’autre doit au contraire viser à en découvrir le «secret», à s’ouvrir à lui pour en accueillir les aspects valables et contribuer ainsi à une plus grande connaissance de chacun.
La migration est un phénomène pas un problème. Nous ne pouvons pas ignorer les défis, mais nous pouvons reconnaître les opportunités. Les migrants et les réfugiés nous aident à renouveler notre mission et la mission de nos communautés !
See the translation of this article here: Symposium about migrants and refugees.
Autres liens sur les images du grand séminaire de Montréal:
Les Vestiges de l’un des bastions de l’ancien fort de la Montagne.