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Lettre adressée à Félix Tshisekedi, Président de la République Démocratique du Congo.

Freddy Kyombo Senga

Par Freddy Kyombo Senga

Monsieur le Président,

Les Latins disaient : « Roma locuta, causa finita », pour dire qu’une fois que Rome a tranché une affaire, il n’y a plus de discussion sur le sujet. La cour constitutionnelle de mon pays vous a institué président en cette journée du 20 janvier 2024, il n’y a plus de discussion sur cette matière pour ceux qui respectent la loi de notre pays. À travers la dernière déclaration de la Cenco[i], vous avez certainement entendu la promesse de l’Église qui s’engage à vous accompagner pour la réussite de votre deuxième mandat auquel vous avez droit.

Monsieur le président, comme citoyen de mon pays, n’étant pas en recherche d’emploi ni d’une quelconque reconnaissance, j’aimerais m’adresser à vous pour vous souhaiter sincèrement une bonne réussite durant votre nouveau mandat, car il en va du bien de tous mes amis et du peuple congolais tout entier. Si le président de la République ne réussit pas, la conséquence directe, c’est la souffrance de la population… nous en avons déjà l’expérience.

Étant observateur de nature, je voudrais vous partager, avec une posture constructive, quelques recommandations que j’exprimerais à tout citoyen qui aurait été élu au poste que vous occupez en cette période de l’histoire de notre pays.

J’aurais demandé à mon président, chef de l’État Congolais, une fois élu, de prendre une distance « d’objectivité » par rapport aux militants de son parti politique qui chercheraient à faire de lui une « propriété » privée de leur famille politique. Je comprends très bien le sentiment de reconnaissance envers ceux qui ont soutenu sa candidature, parce que de la même famille politique. Mais seulement, une fois élu, il est le président de toute la république et donc redevable à toute la nation. Il est responsable de son bilan devant le peuple tout entier. Il devrait donc se méfier de ceux qui s’agglutinent autour de lui et qui lui chuchotent : « c’est notre pouvoir ! » (Faisons-en ce que nous voulons) … Ceux-là ne seront jamais inquiétés par la loi ou jugés par l’histoire en cas d’échec lors de son mandat. En plus de ça, c’est ce genre de comportement qui enracine et exacerbe les clivages tribaux et les actes tribalistes dans notre pays.

J’aurais conseillé à mon président de ne pas permettre à son entourage de traiter avec mépris et arrogance ses adversaires politiques. Si ces derniers étaient capables de compétitionner contre lui, s’ils ont montré la capacité de faire adhérer une partie des citoyens à leur cause, ce sont logiquement des personnes à respecter et avec qui dialoguer.

Je ne parle pas du « dialogue malhonnête pour se répartir le gâteau » … je parle d’un dialogue civilisé où les braves compétiteurs se reconnaissent mutuellement, se demandent pardon pour les « débordements verbaux ou l’excès de zèle de leurs militants » pour se concentrer sur le bien à faire au peuple de toutes tendances confondues. Il est le président et il a le pouvoir d’approcher humblement tout citoyen susceptible de lui prodiguer un conseil sur la manière de mieux servir la population pour laquelle il a postulé pour la présidence.

J’ai sciemment utilisé le mot « humblement » pour signifier que l’orgueil et surtout l’arrogance démontrent plus la « petitesse » d’une personne que sa « grandeur ». Un président a le devoir de sauvegarder la grandeur de son peuple en affichant des valeurs qui promeuvent et fédèrent son peuple. Ainsi, il peut approcher les citoyens qu’on qualifie ou qui se qualifient d’opposants, pour parler avec eux du bien du pays. Puisqu’ils avaient de bonnes idées en postulant comme lui, ils pourraient aussi partager avec lui les méthodes qu’ils ont conçues pour soulager rapidement la souffrance de leur peuple. S’ils sont abordés avec tout le respect, ils ne vont pas refuser d’aider les peuples qu’ils voulaient servir ; à moins d’être foncièrement vicieux. Tout ceci devrait pouvoir se faire sans nécessairement rabaisser ses adversaires politiques en leur proposant « des postes » ou « de l’argent ».

Monsieur le président, un grand homme d’État ratisse large pour trouver les « perles » rares qui peuvent apporter leurs reflets « diversifiés » pour le bien et la beauté d’une nation. Ne laissez surtout pas votre entourage et vos conseillers donner de vous l’image d’un chef qui, curieusement, ne choisit souvent ses collaborateurs que parmi des personnes ressortissantes de son « espace géographique d’origine ».

L’expérience nous a montré que fréquemment les personnes choisies de cette manière, prennent leurs aises et, par leurs actions, ternissent l’image du chef de qui ils se réclament. Quoi de plus naturel que les gens arrivent à conclure que le chef est certainement au courant de ce genre de comportement et qu’il est probablement complice de cette méconduite. Il est parfaitement possible de se mettre à l’abri en mettant sur pied une manière équitable de recruter des collaborateurs qui rassurent la nation entière.

On n’est pas obligé de copier les bêtises des autres. Ainsi, justifier ce comportement avec les arguments tels « c’est la seule personne qui est compétente en ce domaine, c’est un expert mondialement connu » sonne comme un vulgaire mensonge, surtout quand ladite personne n’arrive pas à produire les résultats escomptés. Si les offres d’emploi ou les appels d’offres étaient transparents et réellement publics, je suis sûr que les services seraient nettement meilleurs. Les citoyens auraient déjà leurs permis de conduire ou leurs cartes d’identité et beaucoup d’autres services qui nous classent parmi les pays les plus risibles de la planète Terre. Les compétences, il y en a beaucoup si on les cherche de la bonne manière.

Mon président, le peuple tout entier regarde vers vous pour sentir que votre gouvernance améliore effectivement leur vécu quotidien. Ils n’ont plus besoin de plus de promesses ; tout a été déjà dit. Je demanderai à mon président, s’il veut réussir son deuxième et dernier mandat, d’être extrêmement regardant sur la productivité de chaque ministère et sur l’équité de tous ceux qui façonnent notre nation à la base. Parlant de ces derniers, et ne prenant que l’exemple des enseignants, des agriculteurs, des policiers et des militaires… je n’hésiterais pas à vous dire, qu’en termes de salaire, ils devraient être mieux traités que les parlementaires.

Les enseignants façonnent notre nation en « édifiant » jour après jour tous les citoyens qui seront appelés à bâtir une nation forte au cœur de l’Afrique. En les « paupérisant » tel qu’ils le sont aujourd’hui, nous coupons nous-mêmes les « racines » qui devaient faire de notre pays ce « grand arbre » sous lequel toutes les nations d’Afrique et d’ailleurs pourraient venir s’abriter et vivre. Les enseignants pauvres ne peuvent produire que des cadres médiocres, sans ambition et sans esprit de grandeur.

Quant aux agriculteurs dont la vocation est de nourrir toute la nation, s’ils n’ont pas l’appui des crédits bancaires, ils ne compteraient que sur de maigres récoltes qui feraient du Congolais un peuple mal nourri et dont les ambitions ne resteraient qu’au niveau du « ventre », des besoins de base. Ce n’est pas une recette qui contribue à la construction et au développement d’une nation forte.

Quant aux policiers et militaires, paupérisés à outrance tels qu’ils sont, les armes qu’ils portent deviennent une tentation irrésistible pour la délinquance et la prédation ; ils deviennent un danger pour la population et pour la nation, car leur violence et leur délinquance révoltent la population contre les gouvernants.

Cher président, il y a moyen, sans grands discours et sans trop de promesses, de réparer cette partie de la gestion de la cité. Donnez-leur des salaires décents, même l’équivalent de 500 $ que nos parlementaires « claquent » en une soirée, juste pour s’amuser… cela nourrirait et donnerait un peu de dignité à ceux qui ont la charge d’éduquer, de nourrir et de protéger votre peuple.

J’aurais pu dire tout ceci avec une grande colère, mais j’ai choisi la patience, comme celle de notre Dieu qui nous donne toujours une seconde chance malgré nos errements.

Si vous m’écoutez, c’est très bien ! Si vous vous offusquez, je vous comprendrai très bien. Je suis un citoyen Congolais et je ne fais que mon devoir de m’adresser à celui qui a la responsabilité du peuple auquel j’appartiens. Une parole de Dieu peut nous aider tous : « Sagesse 6, 1-9 ».

Que Dieu le miséricordieux vous bénisse et vous guide dans l’accomplissement de sa volonté pour le peuple congolais

Une voix qui crie dans le désert !


[i] La Conférence épiscopale nationale du Congo (abrégé Cenco) est une conférence épiscopale de l’Église catholique qui rassemble les ordinaires de la hiérarchie catholique en République démocratique du Congo.

POUR l’unité nationale et NON à la fratricide cultivée

Par Freddy Kyombo Senga[i]

Une nation ne peut pas se bâtir grâce à la démonstration des « muscles » ou par la volonté de domination des uns sur les autres.

Le respect mutuel et l’utilisation du cerveau peuvent aboutir à des résultats d’une qualité insoupçonnée, que l’invective et l’insulte ne pourraient obtenir.

Au Québec

J’aimerais commencer par une expérience. Dès mon arrivée au Québec, dans ma communauté ; dans l’église locale et en lisant la documentation venant de l’immigration canadienne, un mot revenait souvent : « l’intégration » ! Des sessions sont organisées à temps et à contretemps, pour que tous les nouveaux arrivants apprennent la façon de vivre du Québec. Ils insistent pour que vous appreniez le plus tôt possible leur histoire, leurs lois, leurs coutumes afin de vous faciliter la vie chez eux. Ils estiment qu’une personne qui apprend tout cela sera un bon voisin, un bon citoyen, une personne avec qui ils pourraient vivre dans la tranquillité.

J’ai rencontré des compatriotes dans ce milieu et ils semblent fiers d’avoir adopté le mode de vie des Québécois. Est-ce le complexe du nègre qui veut ressembler au « Maître » ? Est-ce une question de civilité ou bien c’est juste l’instinct de survie ? Pour ma part je mettrais cela au compte du respect envers les hôtes. Car dans nos différentes cultures, nos proverbes disent que quand on arrive dans un milieu, c’est mieux d’apprendre « les pas des danses » c’est-à-dire les « bonnes manières » du milieu et d’imiter le savoir-vivre de l’habitant.

En République Démocratique du Congo

Dans nos contrées, chaque milieu a son chef coutumier. Celui-ci veille à ce que les coutumes soient respectées pour que les gens vivent dans la paix avec leurs ancêtres et avec les vivants de la communauté. Cela n’a jamais posé de problème à personne. Comme missionnaire, je voyais combien les gens étaient contents et heureux de me voir apprendre leur langue et comprendre leurs coutumes. Même quand je n’arrivais pas à parler comme eux, ils appréciaient les efforts et le respect que je montrais à leur coutume. Cela ne veut pas dire que tout était parfait et qu’il n’y avait rien à critiquer ; mais je savais garder ma place de celui qui est accueilli et qui est accepté. Quand ils avaient besoin de mon point de vue, il le demandait, car il savait que je le donnerais franchement, avec respect, et de bonne foi.

L’interculturalité

C’est ici que j’aimerais parler de la notion de l’interculturalité qui est bien différente de celle de la multiculturalité. Habituellement nous vivons dans des espaces multiculturels où plusieurs cultures vivent côte à côte sans nécessairement se connaître et se côtoyer. Leur connaissance mutuelle est souvent basée sur des stéréotypes et des préjugés.

L’interculturalité suppose que des personnes des différentes cultures fassent une démarche du vivre ensemble avec les autres. Ceci consistera à faire l’effort de connaître la culture de l’autre pour mieux l’apprécier, sans vouloir la juger. Derrière chaque culture il y a des personnes réelles à aimer, avec qui l’on partage un espace vital. Ne reprochons-nous pas à nos colonisateurs d’avoir fait table-rase de nos cultures pour nous imposer leur culture supposée plus civilisée ?

Nous jugeons donc qu’il est très important que nous respections les cultures des uns et des autres et que nous vivions en bonne entente entre les différentes cultures. Tant de gens nous témoignent de la bienveillance de leurs voisins, provenant d’autres cultures, qui les ont sauvés à un moment de détresse. Cela est possible quand des personnes sont conscientes que nous partageons la même humanité malgré le fait d’être nés dans diverses cultures et espaces géographiques.

Conflit à Malemba-Nkulu

Localisation du Haut-Lomami à l’intérieur de la République démocratique du Congo (1)

Dernièrement, des frères historiques Luba se sont entre-tués à Malemba-Nkulu[ii]. Quelles sont les causes réelles de leur conflit ? Les enquêtes de la justice nous le diront[iii]. La faute étant « individuelle » devant la loi, il vaut mieux s’abstenir de stigmatiser des ensembles tribaux ou géographiques. Ces genres de « raccourcis » dans le discours ont causé tant de mal partout où ils ont été utilisés. La police doit faire des enquêtes selon les prescrits de la justice et non pas pour plaire à ceux qui sont au pouvoir.

Quand il y a altercation, il faut, dans un premier temps, interpeller les protagonistes et c’est seulement après une interrogation judicieuse et équitable que l’on peut situer les responsabilités. Les médias, surtout sociaux, ne sont pas la meilleure référence pour une justice équitable. Le but sera, bien sûr, celui d’enlever aux violents toute envie ou velléité de reproduire les actes qu’on leur reproche. Nous ne sommes pas un peuple de « tueurs » et nous ne devrions tolérer personne qui croit pouvoir tuer son prochain impunément.

Si l’État congolais a renoncé à son droit d’exécuter la sentence de la condamnation à mort des vrais criminels et l’a commuée en condamnation à perpétuité, alors aucun citoyen congolais n’a le droit de prendre sur lui l’exécution d’un compatriote qui l’aurait offensé de quelque manière que ce soit. Une justice qui fonctionne sait faire la différence entre les crimes imprescriptibles et les autres genres de crime. C’est à elle d’agir dans une véritable équité, honnêtement et sans aucune influence extérieure, pour dire le droit et faire exécuter les sentences.

Questions identitaires

Nous avons tous observé et constaté la montée des « identités exacerbées » qui ont conduit aux déclarations blessantes de part et d’autre. Les uns clamant d’être les « détenteurs » actuels du « pouvoir » et demandant aux autres de « la fermer » tout simplement ; et les autres fustigeant, de façon péjorative et dédaigneuse, les « habitudes alimentaires » de ceux qui se délectent de la chair de « Milou ». Des incongruités qui n’ont rien à voir avec les vrais problèmes auxquels notre nation devrait faire face pour subvenir aux besoins de ses citoyens et pour se classer parmi les pays émergents. Ce « rush » identitaire n’est souvent que prétexte pour des petits « leaders », en manque de positionnement et de reconnaissance, afin de faire parler d’eux pour se faire remarquer par ceux qui gèrent le pouvoir.

Ainsi, ils manipulent des populations souvent paupérisées pour se donner une visibilité, quitte à les transformer en criminelles occasionnelles. Si nous suivons ces manipulateurs d’un bord ou d’un autre, nous deviendrons autant coupables qu’eux. Cette manipulation a été utilisée pendant longtemps par des gens qui sont encore considérés aujourd’hui comme de vénérables « leaders » alors que leur positionnement a parfois conduit à « l’irréparable ». Fouillez dans notre histoire et vous les trouverez certainement.

La situation récente de Malemba-Nkulu, qui nous fait parler si longuement, n’est que la énième d’une série qui doit s’arrêter. Ces situations sont, malheureusement, souvent liées aux ambitions politiques des uns et des autres. Les populations, souvent ignorantes des enjeux, sont tout simplement instrumentalisées pour créer des « bras de fer identitaires » qui résultent dans des violences, qui finalement les dépassent et débordent.

Baba wa Katanga

Le tristement célèbre « Baba wa Katanga[iv] » s’est finalement repentit en adoubant son « fils béton » en souvenir d’une amitié, « mi-figue, mi-raisin », avec le père de ce dernier, son collègue d’antan. Personne n’était dupe ; et sa fin dramatique en dit long. Mais entretemps, des populations s’étaient entre-tuées et portent encore des blessures que certains malins veulent utiliser encore de nos jours comme « fonds de commerce » sous prétexte de devoir de mémoire. Il n’y a qu’à suivre les réseaux sociaux pour s’en rendre compte. Un devoir de mémoire, il en faut pourtant afin de ne plus répéter perpétuellement la même bêtise criminelle.

Les élections

Les élections qui approchent semblent provoquer une excitation des violences verbales qui ne construisent pas notre nation. C’est comme si la sagesse était en train de déserter la « maison Congo ». Quoi qu’il en soit, c’est une seule personne qui s’engage dans la course pour la magistrature suprême. Même soutenue par son parti et ses militants, elle est la seule qui va répondre de son bilan à la fin de son mandat si elle arrive à vaincre ses adversaires politiques. Elle est la seule qui va gérer le pouvoir qui lui est conféré par les voix des populations des diverses provinces et tribus, à l’issue des élections. Sa seule tribu ne peut pas le placer au pouvoir, à moins d’utiliser la tricherie.

Alors, des slogans fallacieux tels que « c’est notre pouvoir » ne sont que manipulation de mauvais goût, qui enferment le candidat dans sa « tribu », alors qu’il a postulé pour servir « toutes les tribus ». On retrouve cette « ignorance » entretenue, même chez des intellectuels qui sont devenus « pratiquement » incapables de voter autrement que par « appartenance tribale ». Ceci est un « raccourci cognitif » qui nous fait croire que tous ceux qui appartiennent à notre tribu nous veulent forcément du bien, ou qu’ils ont les capacités pour nous mener vers nos aspirations. Et voilà que nous devenons prêts à nous faire des ennemis à vie pour quelqu’un qui ne connaît même pas notre existence et nos vraies préoccupations. Il est temps de nous réveiller tous et de réfléchir autrement.

Le dialogue permanent

La vraie solution résiderait dans un « Dialogue permanent » entre les peuples frères de différentes tribus, afin de regarder en face leur réalité et déraciner toutes les manipulations qui mènent aux situations « irréparables ».

On pourrait, par exemple, construire la fraternité par centre d’intérêt et non pas par l’appartenance à un espace géographique ; ainsi des ingénieurs de tous les horizons, spécialistes dans tel ou tel domaine pourraient partager leurs « intelligences » pour proposer des solutions idoines aux vrais problèmes de développement de notre pays. Les « mutuelles culturelles » mal orientées excellent parfois dans des rivalités insensées.

La pratique de l’interculturalité fait que les « mutuelles culturelles », au lieu d’entrer en compétition les unes avec les autres, apprennent à mieux se connaître, grâce aux échanges culturels, pour mieux s’apprécier réciproquement. Cette démarche est plus fructueuse et enrichissante ; elle n’empêche pas de dénoncer le mal quand il y en a, mais elle aide à dire la vérité paisiblement, sans invective et sans mépris.

Si nous alimentons, par nos commentaires partiaux, ces polarisations extrémistes, nous deviendrons autant d’assassins comme ceux qui seront passés à l’acte. Les pyromanes, il y en a de tous les côtés ! Mais aussi les ouvriers de la paix. Même blessé, on peut toujours aspirer à la paix !

De quel côté es-tu ? C’est l’heure de la vérité pour nous tous !


[i] Freddy Kyombo Senga est membre de la Société des Missionnaires d’Afrique. Il est le nouveau directeur du Centre Afrika à Montréal depuis le 1er juillet 2023.

[ii] Le territoire de Malemba-Nkulu est une entité déconcentrée de la province du Haut-Lomami en république démocratique du Congo.

[iii] RDC: des défenseurs des droits humains réclament des mesures suite aux violences intercommunautaires de Malemba Nkulu

[iv] RDC : Gabriel Kyungu wa Kumwanza, figure politique du Katanga, est décédé

(1) Localisation du Haut-Lomami à l’intérieur de la République démocratique du Congo. Par Derivative work: User:Profoss – Original work: NordNordWest — Cette image vectorielle contient des éléments, éventuellement modifiés, qui ont été extraits de : CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=47013319

Préface du livre d’André-Man Mbombo; Le Congo, un colosse aux pieds d’argile

André-Man Mbombo
André-Man Mbombo

J’ai rencontré André-Man Mbombo pour la première fois en 2018 au Centre Afrika de Montréal[1]. L’année précédente, j’avais été nommé directeur du Centre Afrika de Montréal après une dizaine d’années vécues au Zaïre, l’actuelle République Démocratique du Congo, une autre dizaine d’années au Malawi et cinq ans en Zambie, plus précisément à Lusaka, la capitale.

Je venais de finir de lire son roman « L’albinos avatar et la Première Dame[2]» et je me suis rappelé la réaction de très jeunes enfants qui pleuraient ou qui étaient effrayés en voyant ma peau blanche de « Muzungu[3] ». André-Man m’a alors répondu calmement : « On est tous albinos de quelqu’un d’autre. Tout ce qui est différent ne laisse personne indifférent. » L’albinos avatar était à cette époque une trilogie de trois tomes qui attendaient dans le tiroir de l’éditeur.

En tant qu’avocat et profondément attristé du sort misérable que connaissent tant d’albinos à travers le monde et plus particulièrement en Afrique, André-Man Mbombo se devait de lutter pour la promotion des droits des personnes vivants sans mélanine. Il s’est donné pour mission de rédiger un projet aux Nations Unies avec pour objectif de faire voter une Déclaration universelle des droits humains des personnes vivant avec albinisme.

Au même moment se tenait la 44e session de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF) qui s’est venue à Québec en juillet 2018. Il a alors réussi à soumettre un projet de déclaration et a obtenu l’adoption de la Résolution sur l’importance de l’éducation sur les droits des personnes vivant sans mélanine[4]. Cette importante résolution d’un parlement planétaire reconnaissait que les personnes vivant sans mélanine, que nous appelons amélaniques[5], sont des êtres humains au sens de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Me Mbombo est un homme de loi qui a le sens du devoir et de la mission. Il ne reste pas indifférent devant l’injustice et les inégalités.

J’ai aussi lu son essai sur la nationalité congolaise, L’Apartheid Légal qui piège le Congo : une diaspora ostracisée à vie[6]. Il s’agit d’un véritable plaidoyer contre le principe constitutionnel de l’unicité et de l’exclusivité de la nationalité congolaise. Il s’est même proposé de déposer une requête devant la Cour constitutionnelle de la République Démocratique du Congo en annulation de ce principe qu’il estime inique, car il prive le Congo d’une partie de sa population du fait du constituant.

Dans le présent essai, Me Mbombo s’attaque à la disposition constitutionnelle qui nie les droits de propriété de l’État congolais sur le sol et le sous-sol congolais ainsi que leurs produits naturels. Il s’agit, il faut le reconnaître, d’un exercice difficile dont l’auteur s’acquitte en comparant les Constitutions et lois d’avant 2006 avec la Constitution en vigueur. Ce fait du constituant a accentué le paradoxe congolais : un pays immensément riche dont les populations sont parmi les plus pauvres au monde.

Optimiste de nature, André-Man Mbombo ne qualifie pas les ressources naturelles du Congo de malédictions et démontre comment les minerais du sang extraits des terres congolaises peuvent servir de vecteur de la paix et éloigner les bruits des bottes et les crépitements des balles du Congo. 

Pour lui, la puissance et l’opulence de la République Démocratique du Congo passent absolument par la croissance de sa démographie avec l’abolition du principe de l’unicité et de l’exclusivité de la nationalité congolaise, et par la récupération par l’État congolais de ses droits de propriété sur ses ressources naturelles.

Il prône en outre le paradigme en matière minière pour passer de l’exploitation minière industrielle à l’industrie minière au Congo. Le Congo doit cesser d’être pourvoyeur des matières premières brutes pour une industrialisation des mines et des carrières de l’extraction à la transformation des minerais bruts en produits semi-finis et en produits finis.

Tout compte fait, je trouve cet essai révolutionnaire surtout lorsqu’il met l’être humain au centre des activités minières avec l’introduction de l’acceptabilité sociale dans le développement des projets miniers. En outre, il suggère la création d’un institut national des générations et d’un fonds de développement local pour aider les populations riveraines.

Sur ce, j’ai eu beaucoup de plaisir à lire cet essai que j’ai trouvé intéressant et instructif à tous égards. Je le conseille à tout le monde surtout à ceux et celles qui n’ont jamais mis pied au Congo.

 Serge St-Arneault, M.Afr

André-Man Mbombo, Le Congo , un collosse aux pieds d’argile ? Une constitution qui a détruit l’État congolais, Essai, Édition Solstice Austral, Montréal, 2023, 263 pages. Prix : $30.00


[1] Les Missionnaires d’Afrique (Pères Blancs) ont créé le Centre Afrika en 1988 afin de permettre aux Africains de tisser des liens d’amitié entre eux et favoriser ainsi un vivre-ensemble harmonieux dans la société québécoise. Le Centre au 1644 rue St-Hubert, Montréal, QC H2L 3Z3 | www.centreafrika.com

[2] André-Man Mbombo, L’Albinos avatar et la Première Dame, Solstice Austral, Montréal, 1er édition, 2015, 493 pages.

[3] Terme swahili pour désigner l’Européen blanc.

[4] APF, 44e Session, Québec (Québec), 5-10/07/2018, Annexe 3.

[5] Ce terme amélanique est un néologisme qui exprime bien ce qu’il veut dire, c’est-à-dire ‘sans’ mélamine. Il est proposé à la place du terme « albinos » qui a une connotation péjorative.

[6] Éditions Solstice Austral, Montréal, 2022, 202 pages.

Dimanche le 10 décembre 2023 de 16h00 à 19h00 à l’Afromusée.

VUES D’AFRIQUE; RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Cette émission intitulée Vues d’Afrique sur la situation en République Démocratique du Congo en 2012 a été animée par Robert Lalonde et diffusée sur les ondes de Radio Ville-Marie.

De Zambie, le père Serge St-Arneault y a participé par téléphone. Veuillez cliquer sur le lien suivant pour écouter l’entrevue.