Barthélémy Bazemo, M.Afr, Washington, DC, États-Unis
Originaire du Burkina Faso, le père Bazemo est membre de la Société des Missionnaires d’Afrique depuis 2004. Il a œuvré en Tanzanie et au Kenya. Résident maintenant à Washington, il supervise les activités d’Africa Faith and Justice Network. Analyste politique, il a enseigné à la prestigieuse université Georgetown avant d’être choisi pour coordonner les activités de ses confrères dans toute l’Amérique du Nord. Cela représente environ une centaine de personnes dispersées au Mexique, aux États-Unis et au Canada.
La violence est omniprésente tout autour de nous
La prévalence de la violence en tant que forme destructrice du comportement humain est malheureusement devenue un épisode récurrent de nos vies, « un universel humain », selon l’anthropologue politique Jon Abbink. Dans ce contexte de violence généralisée et d’insécurité croissante, nous sommes appelés à témoigner du royaume d’amour et de paix de Dieu. Cette situation de plus en plus explosive représente le plus grand défi pour notre ministère aujourd’hui.
L’augmentation de la fréquence et de la létalité des incidents violents dans de nombreuses zones de conflit à travers le monde – au Yémen, à Gaza, en Ukraine et particulièrement en Afrique – ne peut plus être ignorée. Cette tendance est très préoccupante, car l’exposition prolongée à la violence aveugle a plusieurs conséquences néfastes, en particulier pour les enfants et les femmes qui sont susceptibles d’être blessés.
Selon le rapport mondial de Human Rights Watch, en 2023, plus de 15 conflits armés, notamment en République démocratique du Congo, au Cameroun, en Éthiopie, au Mozambique, au Mali, au Burkina Faso et au Soudan du Sud, ont provoqué une crise humanitaire et une tragédie humaine avec des souffrances indicibles pour les réfugiés, les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les civils vulnérables. Malheureusement, il est fréquent que la violence et l’insécurité soient liées, car une augmentation de l’une entraîne souvent une augmentation correspondante de l’autre.
L’appréhension constante d’un danger ou d’un préjudice potentiel crée une atmosphère d’anxiété et d’insécurité. Lorsque les gens sont confrontés à des menaces plus importantes pour leur sécurité et leur bien-être, ils ont tendance à éprouver des niveaux d’insécurité plus élevés. Dans ce contexte, le défi moral de notre époque est de succomber à l’attrait d’une violence accrue comme mécanisme privilégié de résolution des problèmes. Cela pose une question fondamentale pour la sécurité mondiale et la survie de l’humanité.
À cet égard, les experts en conflit définissent la violence comme un acte social, physique ou psychologique à l’encontre de soi-même, d’une autre personne ou d’une communauté, visant à causer un préjudice, une blessure, une privation, la mort ou des dommages à des personnes ou à des biens. Il s’agit d’une forme de comportement agressif qui peut se manifester de différentes manières, telles que la violence physique (coups de poing), la violence verbale (menaces, insultes), la violence émotionnelle ou psychologique (brimades, manipulations), la violence sexuelle (pédophilie ou viol) ou la violence systémique (injustice institutionnelle systématique).
En outre, nous avons assisté au cours de la dernière décennie à une montée en flèche de nouvelles formes radicales de violence politique et religieuse, dont les expressions aiguës culminent dans les réseaux transnationaux de criminalité organisée et le terrorisme brutal. Par le biais d’actes de terrorisme, les radicaux religieux, les salafistes-jihadistes et les extrémistes violents utilisent des moyens coercitifs, des menaces ou une violence idéologique pour atteindre leurs objectifs sectaires, religieux, politiques et idéologiques.
L’Afrique du Nord, le Sahel, les Grands Lacs et la Corne de l’Afrique ont été particulièrement touchés. Des groupes terroristes comme Al-Qaïda, l’État islamique et leurs affiliés locaux Boko Haram et Al-Shabab ont forcé 1,7 million de personnes à quitter leur foyer, selon l’Indice mondial du terrorisme (2020). Au total, sept millions de personnes sont touchées par les conséquences du terrorisme en Afrique, et la plupart d’entre elles (femmes et enfants) craignent encore aujourd’hui pour leur sécurité.
La voie à suivre : se tenir debout pour la paix et la justice
La violence omniprésente dans nos sociétés et dans le monde en général peut nous décourager et nous donner un sentiment d’impuissance. Néanmoins, nous devons résister à la tentation de nous abandonner au désespoir et à la résignation. À cette fin, un triple mécanisme de réponse est nécessaire pour sauvegarder la dignité de la vie humaine et promouvoir le bien-être et la sécurité de tous les individus.
Le premier devoir incombe aux dirigeants élus et aux responsables gouvernementaux qui doivent s’acquitter de leurs obligations en matière de protection. Ils doivent aussi défendre l’État de droit en mettant en œuvre des politiques bien conçues qui accordent la priorité à la sécurité des populations vulnérables. Ces initiatives politiques doivent aborder un large éventail de questions de bonne gouvernance et de responsabilité, notamment les inégalités socio-économiques, la pauvreté, le chômage, la discrimination systémique et la marginalisation.
Le deuxième niveau de responsabilité incombe aux chefs traditionnels et aux chefs religieux qui doivent modérer les opinions radicales et l’extrémisme religieux dans les sphères publiques et politiques. Ils sont les gardiens fidèles du patrimoine ancestral et des traditions sacrées des communautés. Il leur incombe de promouvoir l’éducation à la non-violence et une authentique culture de la paix.
Les initiatives interconfessionnelles peuvent offrir des programmes de consolidation de la paix pour favoriser le dialogue, la tolérance et la coexistence pacifique entre les personnes de différents groupes ethniques et traditions religieuses. Dans les zones de conflit, il est essentiel d’investir dans des initiatives de justice réparatrice pour aider à réparer les liens communautaires brisés et favoriser la compréhension mutuelle afin de réintégrer avec succès les délinquants dans la société.
La troisième étape consiste à s’engager et à s’impliquer personnellement. Le président américain John F. Kennedy a déclaré un jour avec éloquence : « Une personne peut faire la différence, et tout le monde devrait essayer ». Ceci est particulièrement important pour les messagers de l’Évangile dans un monde qui a besoin de paix et de réconciliation. L’appel à être des artisans de paix n’est pas facultatif ; au contraire, il s’agit d’une partie essentielle du message de l’Évangile pour notre temps. Heureux sommes-nous si nous répondons à cet appel pour les enfants de Dieu qui ont besoin de paix et de sécurité aujourd’hui.
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